Gérald Darmanin le constate : il est plus difficile de se faire obéir des policiers que des gendarmes !
Le ministre de l'intérieur veut réunir les directions opérationnelles de la Police nationale au niveau départemental. Comme la Gendarmerie. Les Pjistes font de l'obstruction.
Nous sommes le jeudi 13 octobre 2022. (Nouvelle formule, 26e parution)
Rue Bleue est une newsletter écrite pour vous par le directeur de L’Essor de la Gendarmerie nationale. L’éclairage d’un observateur civil, indépendant, attaché à la défense des personnels de l’Arme, dans la ligne de ses prédécesseurs.
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Les personnels de la Direction centrale de la police judiciaire (DCPJ) de la Police nationale (PN) – qui compte 5 600 postes, pas tous OPJ d’ailleurs – semblent dressés contre la réforme proposée par le ministre de l’Intérieur Gerald Darmanin, qui veut modifier profondément le fonctionnement de la Police, en instaurant un échelon départemental, regroupant à ce niveau tous les services, PJ comprise.
(La DCPJ est l'une des quatre directions centrales de la Police nationale. Les autres OPJ sont à la Direction centrale de la sécurité publique, notamment dans les commissariats).
Cette situation de blocage apparent appelle plusieurs réflexions :
1️⃣ Il s’agit, pour le ministre, de reproduire pour la Police le modèle de la Gendarmerie, avec ses groupements, pivots essentiels de la Gendarmerie départementale, qui, à ce jour donne entière satisfaction, avec ses brigades et ses unités de PJ.
L’idée n’est pas nouvelle. “On en parle depuis 30 ans” se souvient un ancien DGPN. Mais elle était restée dans les cartons, jusqu’ici. En effet, le fonctionnement “en silos” de la PN est critiqué depuis longtemps pour son inefficacité… Certains, à l’appui, soulignent la baisse significative des taux d’élucidation depuis plusieurs années.
Pour accompagner sa réforme, le ministre s’engage à augmenter les effectifs d’OPJ (dont la plupart ne sont pas à la DCPJ) : il y en avait 19 478 le 26 juillet 2022 ; on passerait à 27 000 à fin 2027.
Et le ministre s’engage à ne pas réduire les effectifs de l’échelon central, ni celui des offices centraux, rattachés à la DCPJ (10 sur 14, les autres étant rattachés à la direction de la Gendarmerie).
Pour l’instant rien n’y fait : le bras de fer continue. On peut se demander pourquoi.
2️⃣ La première raison réside sans doute dans le caractère auto-géré de la Police. Les syndicats – multiples mais globalement puissants, rassemblant de l’ordre de 90% des effectifs, le plus fort taux de syndicalisation professionnel en France – prétendent être associés à toute modification de l’organisation de leur maison. C’est pourquoi, s’agissant d’une réforme qu'ils n’ont pas souhaitée, leur première revendication est qu’un temps long soit consacré à remettre le projet sur la table de la concertation. C’est évidemment inacceptable pour le ministre.
Il faut aussi savoir que les enquêteurs de la DCPJ se considèrent eux-mêmes comme les seigneurs de la Police. Le ministre est face à une féodalité !
3️⃣ La seconde raison, plus grave et plus générale, est que nous sommes passés d’une société de confiance (relative…) à une société de défiance (absolue), tout spécialement dans la sphère politique.
“Nous ne croyons pas ce qu’on nous dit”, déclare ainsi le porte-parole du Syndicat indépendant des commissaires de police (minoritaire), Matthieu Valet. Dans ces conditions, le ministère peut bien répondre point par point, et démentir en particulier formellement qu'ils s'agirait d’un "nivellement", d’une "reprise en main", qui se ferait au détriment des "grandes affaires", au profit des "chiens écrasés et des vols de sacs à main", les adversaires de la réforme restent sur le terrain de la suspicion.
Rétablir la confiance ne se fait pas en un jour. Depuis longtemps les sociologues de la politique parlent d’une “société bloquée”. La réforme Darmanin en est la dernière victime.
Alain Dumait, directeur de L’Essor
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Trois autres sujets importants :
🟥 L’enquête sur le quadruple homicide perpétré à Chevaline (Haute-Savoie) en 2012, confiée aux gendarmes de la section de recherches de Chambéry, vient d’être officiellement transférée au pôle “Cold Cases” (dossiers froids) de Nanterre, afin d’être relancée.
🟥 L’Arme vient de s’enregistrer auprès d’un service permettant de détecter des tentatives d’usurpation de ses adresses électroniques.
🟥 La brigade de recherches de Romorantin a interpellé l'auteur présumé des violences ayant entraîné la mort d'un homme de 67 ans, lors d'une altercation, le 21 septembre 2017 à Pruniers-en-Sologne. Le suspect a été incarcéré vendredi 7 octobre 2022.
Divers faits :
🟥 Lorsque les gérants d'une station-service ont annoncé que les cuves étaient vides, tous les conducteurs qui faisaient la queue ont fait demi tour, sauf un, qui faisait une crise cardiaque. Deux gendarmes lui ont sauvé la vie.
🟥 La conductrice, qui amenait sa fille à la maternité de Mont-de-Marsan, a été contrôlée en excès de vitesse, avant que les gendarmes ne l’escortent, sirènes hurlantes, à bon port.
🟥 Au terme de six mois d'enquête, les gendarmes ont intercepté un convoi de véhicules chargés de grosses quantités de drogues en provenance d'Espagne. À la clé, une saisie historique pour la Seine-et-Marne.
A lire aussi :
🟥 Jérémy Beaudi, de l’escadron 23/6 de Grasse, remporte le championnat du monde militaire d’Ironman à Hawaï tandis qu’un autre gendarme, Guillaume Bas, termine à la troisième place.
🟥 Picardie : une classe pour préparer le concours d’officier de gendarmerie. Une classe Prépa talents a ouvert cette année à Amiens, une formation ouverte à des étudiants boursiers, qui n’existait jusqu’alors qu’à Paris.
🟥 La brigade de gendarmerie de Faulquemont a sauvé de la mort… une hirondelle
La plus triste : encore un suicide de gendarme
🟥 Un gendarme de la Drôme se donne la mort à Valence. Affecté dans un peloton de surveillance et d'intervention (Psig), le militaire d'une quarantaine d'années a mis fin à ses jours au sein de la caserne de Valence en utilisant son arme de service.
La question du mois de L’Essor
🟥 L’Essor, en octobre, interroge ses lecteurs sur la "convocation" du ministre de l’Intérieur, le 12 septembre, des commandants de groupements de la Gendarmerie.
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(Notre dernière lettre « Rue Bleue », datée du 6 octobre 2022, a été envoyée à 33840 abonnés, et ouverte 17028 fois. Toutes les parutions précédentes sont disponibles)